dimanche 24 novembre 2019

Le Grand Pardon

Pour la dix-huitième semaine sidérale :
  
« Théodose de Bergame [ ... ] observe avec une amusante et naïve vanité [ que ] « Les Souverains Pontifes de Rome ont aussi tellement honoré les évêques de la dite Église, qu'on peut dire sans flatterie, que c'est un évêché des plus nobles de France, [ ... ]
  
« [ ... ] car in temporalibus, l'évêque étant comte de Velay, ne reconnaît autre que le roy, et in spiritualibus, ne reconnaît que le pape, étant exempt de la juridiction du métropilitain ; et de plus, décoré de l'honneur du pallium », –
  
« privilège des archevêques [ que Grégoire-le-Grand (590-604) avait réservé aux patriarcats d'Arles, de Séville et de Canterbury ].
  
Cf. Théodose de Bergame (+ 1625) cité par E. Brejon en 1925
  
« Au surplus, les Souverains Pontifes, en multipliant les plus rares et les plus précieuses indulgences au profit des pèlerins de Notre-Dame du Mont Anis, ont puissamment aidé à la dévotion des peuples chrétiens envers Elle ; [ ... ]
  
« [ ... ] et lorsqu'à la fin du Xe siècle, à la vielle de cette échéance de l'an mille, qui troubla, non pas peut-être autant qu'on l'a dit, mais enfin qui inquiéta une partie de l'humanité, le saint pontife Jean XVI *, mit le comble à ses bienfaits [ ... ]
  
[ * Jean XVI (985-996) [ Giovanni di Gallina Alba ] pour Jean XV en 1925 ]
  
« [ ... ] en confirmant au profit du sanctuaire déjà si aimé, si visité, si populaire, le privilège d'un jour de grand pardon, chaque fois que la fête de l'Annonciation coïnciderait avec le Vendredi-Saint, [ ... ]
  
« [ ... ] Le Puy d'Anis devint pour la chrétienté comme une sorte de port de salut vers lequel tous les regards se tournèrent [ vingt-huit fois en un peu plus de neuf siècles pour Brejon en 1925 ].
  
« La coïncidence prévue allait en effet se réaliser le jour du Vendredi-Saint de l'année 992 ; et dès lors on devine si les foules, déjà antérieurement si nombreuses dans la visite presque quotidienne du sanctuaire, durent répondre en masse à l'appel de l’Église pour bénéficier de son pardon. »
  
Cf. E. Brejon – Notre-Dame de Lourdes avant les Apparitions de 1858Un chapitre d'histoire tombé en oubliNotre-Dame du Puy (1925)
  
Les quarante jubilés du Grand Pardon
au Puy en Velay
Xe siècle
1
992
991
XIe siècle
2
1017
1016
3
1020
1019
4
1051
1050
5
1053
1052
6
1065
1064
7
1076
1075
XIIe siècle
8
1155
1154
9
1160
1159
XIIIe siècle
10
1239
1238
11
1250
1249
12
1223
1222
XIVe siècle
13
1334
1333
14
1345
1344
XVe siècle
15
1407
1406
16
1418
1417
17
1429
1428
18
1440
1439
XVIe siècle
19
1502
1501
20
1513
1512
21
1524
1523
L'édit du Roussillon promulgué par Charles IX
déplace le jour de l'an en 1564
XVIIe siècle
22
1622
23
1633
24
1635
25
1644
XVIIIe siècle
26
1701
27
1712
28
1727
29
1785
30
1796
XIXe siècle
31
1827
32
1842
33
1853
34
1855
35
1864
XXe siècle
36
1910
37
1921
38
1932
XXIe siècle
39
2005
40
2016
  
« 1429 se transforma en année des merveilles, d'autant que le Vendredi saint y tombait le jour de l'Annonciation, une coïncidence liturgique rare : la précédente conjonction remontait à 1407 ! »
  
Cf. Colette Beaune (2008) – Jeanne d'Arc, vérités et légendesMandatée par Dieu ?Un cas à part
  
Mais Brejon signale 1418 pour les quatre jubilés du XVe siècle :
  
« À la prière d'Élie de Lestrange, Martin V prolongea la durée du jubilé, en 1418, jusqu'au mardi Pâques. Et néanmoins, malgré toutes les précautions, trente personnes périrent, étouffées dans la presse »
  
Cf. E. Brejon (1925) – op. cit. ibidem
  
  
  
  

vendredi 22 novembre 2019

Celle qui joue

Pour la dix-septième semaine sidérale :
  
Puisse que l'Immaculée Conception est la Dame de Lourdes et celle de Massabielle, la Suzeraine du Comté de Bigorre, il est avéré que « la chose » décrite par Bernadette fut Notre-Dame du Puy en Velay sur le Mont Anis.
  
Non pas la Vierge Noire – si l'on peut dire – ni la représentation de la petite demoiselle blanche que la Sainte s'est plut à dire indescriptible ni l'une des quatorze cent vingt-quatre effigies dans les sanctuaires français que signale Brejon en 1925.
  
Je veux dire la Petite fille [ de neuf ans ] qui apparaît dans la lumière qu'on nous a donné à entendre comme notre enfant dans la vallée de l'Ange et que le sheykh abd ar-Razzâq Yayâ qualifie en 2006 de théophanie singulière – celle de Lalitâ ou de Béatrice.
  
C'est Elle que nous avons salué sur le Berg d'Alsem – au Sud de Bruxelles – quand nous l'eûmes reconnue sous la déesse Artémis telle une herbe amère qu'on identifie à l'Armoise, à l'Absinthe ou à l'Anis dont la cosse est semblable à une étoile.
  
Et c'est Celle dont il est question le 25 février 1858 pour la neuvième apparition quand Elle demande à Bernadette de manger cette herbe que Laurentin qualifie en 1972 de Dorine en la décrivant comme une plante sauvage – une sorte de cresson au goût âcre :
  
« Que minyarat d'aquère hèrbe qui ey athéu »
  
On a beau lui dire que ce sont les animaux qui mangent de l'herbe, l'eau de la fontaine et cette Saxifrage dont les lettres du nom commun forment l'anagramme de Oindre sont les signes et les viatiques indiqués ce jour là par la Petite.
  
Georges Sand qui en parle à propos de Laura (1864) qualifie cette Saxifrage oppositifolia ou alternifolium – pour les feuilles opposées qui la caractérisent – de lichen polaire ; tandis que son nom latin – Chrysosplenium – l'associe à la couleur de l'Or.
  
Or, cette lumière polaire que l'Apocalypse de Saint-Jean identifie à l'amertume de l'étoile Absinthe – cf. Ap 8, 11 – doit nous rappeler que cette saveur amère ou âcre est celle que la rhétorique des cinq éléments / agents identifie au feu et au métal :
  
Eau
Hydraulique
Salé
Feu
Igné
Amer
Bois
Ligné
Sur
Métal
Métallique
Âcre
Terre
Tellurique
Sucré
  
Sans doute, ces caractéristiques doivent-elles aussi nous rappeler le petit livre ouvert dans la main de l'ange qui se tient debout sur la mer et sur la terre et qu'une voix venue du Ciel enjoint au voyant de prendre – cf. Ap 10, 8.
  
Quand l'ange lui dit de prendre et de manger ce petit livre qu'un symbole graphique des dix Commandements nous invite à interpréter comme le Verbe de Dieu – « I / II / III » – dans une Tétraktys – « IIII » – il lui annonce [ ... ] – cf. Ap 10, 9 et 10 –
  
« [ qu'il ] sera amer dans [ son ] ventre,
mais [ que ] dans [ sa ] bouche il sera doux comme le miel. »
  
Ce pourquoi, il faut qu'il prophétise [ encore ] « sur un grand nombre de peuples, de nations, de langues et de rois » – cf. Ap 10, 11.
  
  
  
  

mercredi 20 novembre 2019

Le Capet de Saint Jean

Pour la quinzième semaine sidérale :
  
« Ne disposant pas de documents locaux qui puisse nous éclairer sur les mentalités religieuses de l'époque, allons en chercher dans les archives d'Aquitaine :
  
« En l'an 1017 au temps du Duc Sanche Guillaume V de Gascogne, Baudoin, abbé du monastère de Saint Jean d'Angéli fit savoir qu'il avait trouvé dans son couvent la tête de Saint Jean Baptiste enfermée dans une chasse.
  
« L'Aquitaine, la France, l'Espagne et l'Italie émus par cette découverte accouraient en pèlerinage de toutes parts pour la voir et prier en communion avec celui qui avait connu et baptisé Notre Seigneur.
  
« Le Roi de France Robert II dit Le Pieux, fils d'Hugues Capet, le Roi de Navarre, le Duc de Gascogne ainsi que tous les autres comtes ou Princes de considération précédèrent la noblesse et le peuple en venant pour honorer de leur présence et de leurs riches et magnifiques présents, des reliques aussi vénérables.
  
« Adémar de Chabannes [ moine de Saint Cybard d’Angoulême et chroniqueur de l'histoire d'Aquitaine jusqu'en 1028 ] voyant ces pèlerinages croître en importance, s'inquiéta, estimant que ces reliques n'étaient pas suffisamment certifiées.
  
« Il publia qu'on ne savait pas comment elles avaient été portées en ce lieu, ni par qui, ni quand, ni si la tête était vraiment celle de Jean le Précurseur.
  
« Il émit un grand doute en révélant que selon Prosper, au temps de l'Empereur Théodose [ 394-395 ], cette tête fut portée à Constantinople ; que depuis, au temps de l'Empereur Justin [ 518-527 ], des moines pensaient l'avoir enlevée de Jérusalem, qu'un quidam la leur déroba et la porta secrètement en la ville d'Emèse [ en Syrie ] suivant la chronique de Marcellin le Comte [ + 534 ].
  
« Si ces scrupules ont affaibli de nos jours la foi des pèlerins, il n'en fut pas de même à l'époque, car nous dit Pierre de Marca [ + 1662 ], en son histoire de Béarn :
  
« ... Sans s'arrester aux scrupules qui ont affoibli de nos jours le zèle des fidèles, on se portoit avec grande satisfaction à tesmoigner l'honneur et le culte de société que l'on doit à ceux qui possèdent la gloire pour laquelle les autres combattent... »
  
Cf. Pierre Pène (2004) – Lourdes, les secretsLe TestamentLes Vikings
  
  
  
  

lundi 18 novembre 2019

Le détroit à Bétharram

Pour la quatorzième semaine sidérale :
  
« Au Moyen-Âge, la plupart des voyageurs passant à Lourdes, longeaient les montagnes pour se rendre de la mer à l'océan ou inversement. La grande majorité de ceux qui voulaient passer en Espagne le faisaient par Roncevaux, le Somport ou Andorre.
  
« Il fallait connaître le pays ou être bien renseigné comme c'était le cas pour certains pèlerins de Saint Jacques, pour connaître le passage menant au Port de Gavarnie.
  
« Alors que depuis la plaine on voit les montagnes s'étager régulièrement de mille à trois mille mètres, comment soupçonner que derrière les premières – Pic du Jer, Pibeste et Béout – se cachait une merveilleuse et large vallée de seize kilomètres de profondeur ?
  
[ « Que les romantiques du XIXe siècle [ George Sand ] qualifieront de plus belle vallée du monde [ le plus beau pays du monde ] » ]
  
« Ceci peut expliquer que la vallée du Lavedan restât inconnue des hordes barbares passant sur la route Est-Ouest. Elle ne fut jamais inquiétée que par quelques pillards espagnols.
  
« Ce passage pour initiés se trouvait sur la rive droite du gave, dans le sens Est / Ouest : entre les contreforts des deux reliefs lourdais soit entre le Mont des Justices et Lanne-Dessus – Soum de Lanne – et dans le sens Sud-Est / Nord-Ouest entre la côte des Courriers et le Val du Paradis.
  
« Nous savons le nom de cet étroit passage grâce à un acte notarié de 1590 – Collection privé de l'auteur. Il s'appelait le Détroit de Dourix. »
  
Cf. Pierre Pène (2004) – Lourdes, les secretsEt maintenant ? – D'où vient cet attrait pour Lourdes ?
  
« Il faut chercher l'origine du sanctuaire de Notre-Dame de Bétharram, d'abord appelé Gatarram, au XIVe siècle. Ici c'est une double légende qui donna naissance au culte marial.
  
« D'abord en premier, la découverte d'une statue auréolée d'une brillante lumière, découverte par un bœuf et deux bergers à l'endroit où l'on trouve aujourd'hui la chapelle latérale [ des ] deths pastous – [ les deux pasteurs ].
  
« La statue apportée à l'église sera chaque fois retrouvée à l'endroit initial.
  
« En second celle d'une jeune fille sur le point de se noyer dans le gave qui implora si bien la Sainte Vierge que providentiellement elle rencontra un beau rameau – ü beth arram – qui la sauva. »
  
Cf. Pierre Pène (2004) – Lourdes, les secretsL'héritageDepuis 1350 environ, Notre-Dame de Bétharram
  
« Bernadette a prié [ ... ] devant [ ... ] la Vierge aux bergers »
  
  
  
  

vendredi 15 novembre 2019

L'affiliation johannique

Pour la treizième semaine sidérale :
  
Nous avons déjà indiqué que le canon néotestamentaire se présente à nous comme la métaphore d'un verset de la seconde épître de Pierre qui nous parle des huit passagers de l'arche de Noé – cf. 2 P 2, 5.
  
Nous supposons qu'il s'agit d'un ensemble organisé dès l'origine – après le martyr de Jacques – auquel on ajoute par la suite – après le martyr de Pierre – les pièces d'un corpus johannique proche d'un corpus apocryphe.
  
Notre métaphore suppose le démembrement des huit corpus dans un ensemble synoptique où la suite des pièces garde un sens chronologique pour la succession des prédications qui explique la multiplication des quatre évangiles.
  
Nous ajoutons dans cet ensemble les fragments qui organisent les prédications autour des épîtres de Pierre et la pièce qui témoigne de la tradition apocryphe attribuée à Jude et forcement occulte par nature.
  
Les huit corpus noachiques – 2 P 2, 5
Évangiles
Épîtres
Prédications
1
Matthieu
[ Paul ]
aux hébreux
2
Marc
Jean l'Ancien 1 et 2
aux israélites
1 P
Prédication de Pierre aux Stromates de Clément d'Alexandrie
2 P ▼
3
Luc
[ Actes ]
aux païens
4
Le disciple que Jésus aimait
1 Jean
universelle
Épîtres
5
Corpus paulinien
aux assemblées et à ses enfants
6
Jacques
aux douze tribus dans la dispersion
7
Pierre 1 et 2
aux élus qui ont reçu la foi
►  1 Jean et Jean l'Ancien 1 et 2 
8
Jude
aux appelés qui sont aimés en Dieu
Le corpus johannique
Prologue du quatrième évangile
1 Jean
Apocalypse
Le corpus apocryphe
Paroles cachées de Jésus le Vivant à son didyme Jude Thomas
  
On peut s'interroger sur les raisons pour lesquelles la Prédication de Pierre qui subsiste comme fragments dans les Stromates de Clément d'Alexandrie est absente du Nouveau Testament où elle devrait s'insérer entre ses deux épîtres.
  
Sans doute parce qu'elle introduit une rupture entre sa prédication aux israélites et celle de Paul aux païens pour laquelle l’apôtre des gentils recherche à Jérusalem sa caution avec celle de Jacques, le chef de l'église originelle.
  
Le troisième personnage que Paul rencontre avec Jacques auprès de Pierre ne peut être que Jean l'Ancien que les Actes de Luc et la première épître du prince des apôtres nous présente comme l'auteur du deuxième évangile qu'on attribue à Marc.
  
Cette discontinuité dans la succession des prédications ne doit pas nous dissimuler la cohérence des tenants et des aboutissements qui réunit les prédications originelle et universelle que Matthieu et la dernière épître de Paul consacrent aux hébreux.
  
Nous ne savons pas à qui nous devons l'évangile du disciple que Jésus aimait. En l'attribuant à Lazare et à la communauté de Béthanie, nous avons pu croire qu'on l'avait placé sous le patronyme de Jean l'Ancien.
  
Mais ce qui réunit la première épître de Jean et le Prologue du quatrième évangile ne les rend pas nécessairement solidaire de la prédication universelle que nous attribuons au disciple que Jésus aimait.
  
Autrement dit, le Prologue et la première épître de Jean attribuent le quatrième évangile à l'auteur de l'Apocalypse qui dans son récit de la Passion l'affilie à la famille du Sauveur et le rapproche du cénacle de Béthanie – cf. Jn 19, 26 et 27 :
  
« Jésus vit sa mère et, près d'elle, le disciple qu'il aimait.
Il dit à sa mère : Femme, voici ton fils.
  
Puis, il dit au disciple : Voici ta mère.
Dès ce moment-là, le disciple la prit chez lui. »
  
C'est qu'il y a trois cercles qui gravitent autour du Messie :
  • Le cercle de sa famille dont se revendiquent Jacques [ le Juste ] et Jude [ Thomas ]
  • Le cercle de ses apôtres que [ Simon ] Pierre représente et où Paul s'invite
  • Le cercle de ses intimes à Béthanie où Jean [ de Zébédée ] s'affilie
  
Il y a donc une osmose qui s'élabore à partir de la Passion entre la tradition apocryphe qu'on attribue à Jude et la tradition johannique qui recouvre celle de Béthanie au moment où l'apôtre Pierre et le didyme de Jésus [ Dhû'l-Kifl ] se séparent.
  
La route du didyme de Jésus [ Yuz Asaf ] passe par Édesse et s'arrête à Srinagar, celle du prince des apôtres passe par Alexandrie et s'arrête à Rome, celle du fils adoptif de Marie passe par Patmos et s'arrête à Éphèse.
  
C'est dans cette géographie que l'Apocalypse apparaît par anticipation comme un texte nazaréen qui prolonge le quatrième évangile où la tradition hébraïque convoque l'Esprit d’Élie avec son Messie et le Sceau des prophètes – cf. Jn 1, 20-21 et 25.