mardi 27 août 2024

Le tarot des Bohémiens

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Retour vers la demeure des haltes

Pour la demeure du deuxième jour qui succède à la nuit
au premier mois du Janus :

La Mère, la Sœur, l’Épouse et la Fille
vous ont été rendues licites
dans les limites de la décence inhérente à leurs prérogatives.

Ne sacralisez que la conjonction
dans le seul genre qui vous est donné.

L'identification des vingt-et-une lames du Tarot à la valeur (30) de la lettre hébraïque sur l'arcane majeure du Pendu (XII) en donne l'origine pour l'année 1300 – « 21 x 30 » – et sa destiné pour l'année 2030 – celle du Fou n'étant pas dénombrée.

L'homophonie des lames avec la lettre arabe est d'autant plus évidente qu'il s'agit ici du « Lamed » hébraïque ou du « Lambda » grec qui gardent la valeur (30) de la douzième lettre en latin – celle qui correspond à l'idéogramme du Lion et du Sphinx.

Il ne faut donc pas s'étonner de voir cet idéogramme subir l'action d'une Dame qui symbolise la Force sur l'arcane précédente (XI) où elle écarte les mâchoires d'un Lion dévoilant par la-même le Saint des saints d'un Temple gardé par la Papesse.

Notons que l'Année Sainte décrétée par le pape Boniface VIII en 1300 est celle de la pérégrination dantesque dans la Divine Comédie de Dante et Béatrice qui guide le poète au Paradis à la suite de Virgile trouve ici son identification.

La Papesse qui se trouvait à l'origine dans l'ordre ascendant des triomphes sur la quatrième lame entre l'Empereur et le Pape pour des raisons éminemment politique se trouve rétrogradée sur la deuxième arcane depuis la fin du XIXe siècle.

La plus ancienne occurrence de ce jeu de cartes date de 1428 et sa réalisation aurait été motivée par le mariage de Filippo Visconti avec Marie de Savoie mais malheureusement la carte de la Papesse est perdue.

La seconde occurrence date de 1450 pour le mariage de Francesco Sforza – le duc de Milan – avec Bianca Maria Visconti. Gertrude Moakley a cru pouvoir établir en 1966 que l'image de la papesse y évoque la mémoire d'une aïeule.

Il s'agit de Manfreda de Pirovano, la cousine germaine de Matteo Visconti, le vicaire impérial de Milan au début du XIV siècle avec qui le compte des lames (630) que nous avons théorisé se trouve ici confirmé.

Selon toute vraisemblance, il s'agit d'une tradition familiale d'origine orientale que l'on peut situer en Bohème et dont la teneur réelle n'était transmise qu'aux femmes sous le couvert du tiers-ordre d'un ordre mendiant reconnaissable à la bure franciscaine de son effigie.

Cf. Alain Boureau – La papesse Jeanne – La papesse et ses sœurs – Jeanne au tarot [ pour ] le jeu Visconti-Sforza (1988)

« [ Vers 1260 ] arrive à Milan une femme avec un enfant qui se nomme Guillelma – ou Guillemette, Guillemine, Wilhelmine – et qui passe pour originaire de Bohême.

« Son disciple André Samarita, brûlé en même temps que Manfreda [ « peu après 1300 » ] avait affirmé au cours de son procès par l'Inquisition qu'elle était la fille du roi de Bohême Przémisl et de son épouse Constante.

« Son message messianique disait la fin des temps précédée par sa venue à elle Guillelma, incarnation du Saint-Esprit. »

« Guillelma connut un succès certain dans les milieux aristocratiques de Milan et parmi les Humiliés [ « ces laïcs constitués en ordres religieux urbains très actifs dans l'Italie du Nord, reconnus et encouragés par l’Église mais toujours au bord de l'hérésie » ] ; ...

« ... elle constitua une association de fidèles qui portaient la bure brune des Humiliés [ « imité des Franciscains » ].

« Guillelma exhibait des stigmates et possédait le pouvoir de guérir ; elle mourut en 1282 et fut enterrée dans le cimetière cistercien de Chiaravalle. [ ... ]

« On construisit autour de sa tombe une chapelle avec un autel et une image de Guillelma. Un culte s'installa : ...

« ... les jours anniversaires de sa mort et de la translation de son corps et le jour de la Pentecôte – fête du Saint-Esprit – on allumait des lampes, on chantait des hymnes, on récitait des litanies.

« L'inquisition s'inquiéta de ce culte hétérodoxe et ouvrit un procès en 1300 : trente disciples furent inculpés [ ... ] ; ...

« ... le procès mentionne un banquet de la secte où se réunirent 129 fidèles qui se recrutaient dans les meilleurs familles de Milan.

« On trouve parmi eux François Garbagnate, futur professeur de droit à Padoue qui appartenait à une famille alliée aux Visconti.

« L'inquisition fit brûler les ossements de Guillelma et envoya au bûcher les trois disciples les plus éminents : Manfreda de Pirovano, André Samarita et Jacqueline dei Bassani – une autre Humiliée. »

« Le procès de 1300 permet de préciser assez exactement le statut pontifical de Manfreda surtout si on le complète de la bulle « Dudum ad nostri apostolatus » éditée le 23 mars 1324 par Jean XXII [ ... ] et des indications de Reynaldi dans ses Annales ecclésiastiques.

« Jean XXII intervint bien après le procès, sans doute parce que la secte vivait encore sous la cendre chaude et que le pape saisissait cette occasion pour s'attaquer à ses ennemis gibelins du Milanais ; ...

« ... il accusait Matteo Visconti d'avoir protégé sa cousine Manfreda et suspectait d'hérésie Galéas, le propres fils de Matteo ainsi que François Garbagnate, leur allié.

On comprend [ ... ] que les Visconti-Sforza du XVe siècle toujours et résolument antipontificaux aient choyé le souvenir de Manfreda. »

« Manfreda affirmait que l'Esprit-Saint s'était incarné en la personne d'une certaine Guillelma et que [ celle-ci ] avait bénéficié de l'assomption divine » [ d'après le Dictionnaire de Théologie catholique (1982) ].

« Le corps de Guillelma se confondait avec celui du Christ par une double et successive incarnation du Verbe puis de l'Esprit.

[ Là où l'incarnation de la Dame de tous les peuples – Marie-Paule – incarne la Fille de la Mère de Dieu et donc la Sœur du Fils dans l'unité du Saint-Esprit. ]

« Guillelma – morte et ressuscitée – était apparue avant son ascension et avait désigné Manfreda [ de Pirovano ] comme son vicaire donc comme [ le ] vrai pape ; ...

« ... en effet, Guillelma avait aboli le pape et les cardinaux ; ...

« ... Boniface VIII n'avait aucun droit « parce qu'il n'avait pas été créé justement ». [ ... ]

Cf. Alain Boureau – La papesse Jeanne – La papesse et ses sœurs – La papesse Manfreda (1988)

« ... on se rappelle Wilhelmine, incarnation du Saint-Esprit vers 1300 ... »

Cf. Alain Boureau – La papesse Jeanne – Le corps de Jeanne (1988)

   

    

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