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Retour vers la demeure des lettres
Pour
la demeure de la deuxième sphère
parmi les neuf sphères
célestes de la vingt-et-unième lettre :
« Sîn »
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Toute prière dans son acception la plus universelle qui unit la louange à la supplication est entièrement comprise par la prosternation.
Elle n'a que six sortes de mouvement : celui des genoux, celui du tronc, celui du torse, celui du cou, celui des yeux et celui du front.
La prosternation du front est la plus complète car elle nécessite les six appuis alors que les autres n'en demandent que deux si on est debout ou quatre si on est assis.
Les six appuis sont ceux des pieds, ceux des genoux et ceux des mains.
La prière immobile est comme une prosternation sans appui bien qu'elle nécessite toujours une assise.
Elle se pratique aussi en mouvement dans le ralentissement et la résorption des sens ou au contraire dans l'accélération et l'évitement.
La prosternation des yeux est la plus intime car elle est la plus proche du cœur où s'unissent les flux de la Terre et du Ciel.
Le Prieur du val d'Or nous a enseigné la prosternation du tronc qui nous a toujours paru suffisante si elle est suffisamment profonde.
Celle des genoux reste incomplète quand elle n'invite pas à la prosternation du front sauf quand l'assise se fait sur un siège où le fléchissement de la nuque s'impose.
Le Prieur du val d'Or pratiquait la prosternation des yeux d'une façon très particulière en les levant vers le Ciel.
Ce regard posé au-dessus des choses accomplissait la prosternation de Celui qui la contemple.
Son humilité extrême est une participation rendue nécessaire à toute oblation par la prosternation.
Les prosternations les plus manifestes sont caduques en l'absence du cœur qui sanctifie les salutations les plus ténues.
C'est en effet le cœur de l'âme qui participe au mouvement des réalités les plus subtiles vers lesquelles l'entraîne celui du corps qui se prosterne.
Tout rite n'est que la disposition de ce mouvement des êtres vers leur Source profonde.
Le Sheykh al-Akbar décrit toute pérégrination comme une prière en mouvement et la prière comme un pèlerinage immobile.
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« L'après-midi en compagnie de Gille Guay et de Sorrensen, nous allons rendre visite [ en 1959 ] à Lama Govinda qui habite non loin de là avec sa femme, la photographe parsie Li Gotami. Sorrensen me raconte son histoire :
« Lama Govinda est un érudit qui a appris le pali de façon à étudier les écrits bouddhistes dans le texte.
« Il est d'abord moine bouddhiste à Ceylan puis il est envoyé à Calcuta pour représenter le bouddhisme Hinâyana dans un Congrès international.
« Mais il se convertit au bouddhisme Mahayana. C'est à cette époque que [ Sorrensen ] le rencontre à Shantiniketan.
« Il se fait appeler alors Brahmâcari Govinda. Il part au Tibet vers 1936, est initié au tantrisme et devient lama.
« À son retour, il se marie avec une femme parsie – ce qui est admis en tant que lama mais c'est très mal vu des indiens.
« Il habite la maison du Dr Evans Wentz (+ 1965) [ le rédacteur de la traduction du « Bardo Thödol » de Padmasambhava par le lama Kazi Dawa Samdup ] qui désirait la louer mais à condition qu'aucune femme n'y habite... »
« Lama Govinda nous reçoit assis sur une sorte d'estrade couverte de tapis rouge. Les traits du visage fin, un long bouc bien taillé, les pommettes saillantes, les yeux petits et bridés.
« Il n'est pas très grand et s'exprime en anglais avec un fort accent allemand. La vue sur l'Himalaya est superbe.
« De l'autre côté de la montagne, c'est le Tibet » – me dit-il :
« Autrefois une route très fréquentée y allait mais elle a été fermée depuis l'occupation [ du pays ] par les Chinois. »
« Sa femme – Li Gotami – est une matrone imposante à la voix forte qui intervient à tout propos pour donner son opinion. Elle semble avoir du mal à supporter qu'on ne lui prête pas une attention exclusive.
« Les murs sont couverts de livres. Lama Govinda donne une impression de grande érudition. Il a tout lu, s'intéresse à tout.
« Il m'interroge sur les chances de De Gaulle de rétablir la paix en Algérie. Il raconte beaucoup d'histoire et d'anecdotes. Il a séjourné en Tunisie autrefois et y a étudié les transports mystiques de la secte des « Aïnou Laoussa »... [ ... ]
« La conversation continue sur Guénon pour lequel Lama Govinda a beaucoup d'admiration. Je promets en prenant congé de lui envoyer des livres de Guénon qui l’intéressent et qu'il ne peut se procurer en Inde. »
Cf. Daniels Roumanoff – Candide au pays des Gourous – A la recherche d'un maître – Almora : la colonie des européens – Lama Govinda : un bouddhiste érudit (1990)
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