mardi 23 août 2022

Le secret

Pour le soixantième cycle du Janus
quand la nuit absorbe le jour :

« Dans un texte rafraîchissant quand on sort de lire les niaiseries de René Bazin, Dominique Casajus commente avec scepticisme la célèbre lettre de Moussa Ag Amastane à Marie de Blic, envoyée à la mort de Foucauld –

« Charles le Marabout n'est pas mort que pour vous autres seuls,
il est mort aussi pour nous tous. »

«  – relevant qu'elle a été écrite en arabe par un interprète militaire et transmise par la voie administrative, ce qui lui permet de la voir comme une pièce du jeu politique que jouait l'aménokal à ce moment précis.

« Après tout, c'est bien possible, mais n'enlève rien à l'amitié, non plus que les arrières pensées politiques de Foucauld lors de ses premières rencontres avec Moussa.

« Le montre par exemple la lettre du 5 janvier 1914 de Moussa à Foucauld, citée par Casajus : « Ne m'abandonne pas. Je veux de toi une chose : prie beaucoup pour moi. »

« Moussa avait déjà un maître spirituel, le cheikh Baye – un soufi – le « vainqueur de Foucauld » dira [ Louis ] Massignon, puisqu'il a achevé l'islamisation du Hoggar du vivant même du Français.

« Il n'a pas trouvé en Foucauld un directeur spirituel qu'il ne cherchait pas. Mais il est devenu son ami et l'a pleuré comme un saint de Dieu, sans céder sur sa propre foi. »

Cf. François Sureau – Je ne pense plus voyager. La mort de Charles de Foucauld – « Jusqu'au jugement denier » (2016)

Foucauld nous apparaît dans le récit de Sureau comme un pèlerin qui aurait visité toutes les demeures de la sainteté chrétienne – celles que nous qualifions de grégorienne ou de franciscaine mais aussi celle qu'Augustin a scellé dans son œuvre.

« La demeure que le Français ne visite pas – celle de Moussa et celle du Sheykh Baye – est la demeure de la sainteté muḥammadienne – celle que nous qualifions d'aḥmadienne quand nous voulons la distinguer d'un tasawwuf strictement akbarien.

« De Rimbaud à Aden, Chauvel écrit : « Il donnait l'impression d'avoir manqué sa destinée. Cette éternité, malgré la mer, malgré le soleil, il l'avait perdue. Il avait changé toute sa vie pour trouver ce repos qui n'était pas en lui, en l'homme seul. »

« Foucauld, son contemporain, auquel l'uni à mes yeux une fraternité dont le secret gît hors d'atteinte des filets claudéliens, s'est porté à l'opposé. »

Cf. François Sureau – Je ne pense plus voyager. La mort de Charles de Foucauld – « Jusqu'au jugement denier » (2016)

Mais Chauvel n'a pas suivi Rimbaud jusqu'à la demeure du Harar qui lui échappe.

« Dans les premiers jours de janvier 1908 il se sent mourir. Il a écrit à Laperrine et au préfet apostolique du Sahara :

« Jésus – Marie – Joseph »

Je vous donne mon âme, mon esprit et ma vie.

« Il perd connaissance. Quand il revient à lui, un messager de Moussa Ag Amastane lui tend un bol de lait de chèvre, en l'appelant « frère Charles » [ et ] « Sidi Marabout ».

« C'est à présent qu'il a reçu cette communion-là [ celle de la sagesse prophétique ] que Foucauld appartient à ceux chez qui il a choisi de vivre, ...

« ... parce qu'il n'a pas seulement donné ce que l'armée, ou d'autres, lui donnait, mais tout de lui-même, sa chair mais aussi sa gaieté et ses espoir, jusqu'à risquer de mourir. »

Cf. François Sureau – Je ne pense plus voyager. La mort de Charles de Foucauld – « Jusqu'au jugement denier » (2016)

Ce don nous en rappelle un autre dans le domaine oriental où avec Jack Kerouac la beat génération passe du mahâyâna originel – celui du zen – au mahâyâna définitif – celui qui caractérise la voie du Daishônin Nichiren.

Dans la vision du Sheykh al-Akbar, c'est le Sceau de la sainteté muḥammadienne qui intercède auprès du Sceau des prophètes pour qu'il accède à la station de la Lumière bleue qui les caractérise.

Il est alors question d'une ressemblance entre l'Imam du Tawḥid et le Sceau de la sainteté muḥammadienne auquel le Sheykh al-Akbar s'est identifié en tant qu'héritier du Messie d'Israël – 'Isâ ibn Myriam – et du Sceau des prophètes.

Cette ressemblance est particulièrement évidente du point de vue de l'économie cyclique des sceaux comme Slimane Rezki s'en aperçoit dans son avant-propos à la Mise en œuvre des études traditionnelles de René Guénon.

Guénon signale en effet une similitude dans les échéances entre la mission du Christ et celle du Prophète qu'on peut réitérer avec le Muḥyi'd-Dîn et le Qutb al-Maktum mais qu'il est impossible de reproduire ensuite à propos du Sheykh abd al-Wâḥid.

Le Sheykh abd al-Wâḥid Yaḥya ne peut être ici que le Précurseur d'une intercession où le Sheykh al-Akbar identifie le Christ au Sceau d'une sainteté universelle comprenant celle à laquelle les martyrs de Sureau se sont livrés pour nous.

Allâh al-Kârim !

Dites-moi à quelle heure je dois être transporté à bord.

   

    

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