jeudi 7 avril 2022

Le monde des quantités défuntes

Pour le neuvième cycle du dixième mois de la décade
comprenant la nuit et le jour :

« Il y a en mathématique un endroit où l'on rassemble les idées douteuses et déviantes. Je l'appellerai la Théorie des bizarres.

« On y trouve les infinitésimaux, par exemple. Des nombres plus petit que tout nombre [ entier ] et pourtant plus grands que zéro.

« Si on ajoute un infinitésimal à lui-même, peu importe combien de fois, il reste inférieur à tout nombre [ entier ].

« Plus de deux mille ans avant l'avènement de l'analyse, le mathématicien grec Archimède avait proscrit les infinitésimaux dans une interdiction connue sous le nom d'axiome d'Archimède.

« Bien qu'il soit difficile d'expliquer pourquoi un nombre plus petit que n'importe quel nombre et pourtant plus grand que zéro offense le sens commun sans parvenir à l'indigner vraiment.

« C'est vers la Théorie du bizarre et les infinitésimaux que se tourna Leibniz pour définir la direction prise par une courbe. » [ ... ]

Cf. David Berlinski – Une brève histoire des mathsL'analyse (2004)

« Face à l'analyse et à la théorie des équations différentielles, les mathématiciens et les physiciens réalisèrent avec un sentiment de gène qu'un instrument d'une grande utilité se trouvait quelque peu compromis par le fait que son principal concept ne tenait pas debout ;

« [ ... ] un point souligné avec force par l'évêque et philosophe Berkeley, qui se gaussa de l'analyse en appelant les infinitésimaux « les fantômes de quantités défuntes ».

« En bon philosophe, Berkeley ne s'inquiétait pas de savoir pourquoi ces fantômes s'avéraient aussi débordants de vitalité.

« Ce n'est que deux cents ans plus tard que les mathématiciens purent affirmer sans mentir qu'ils avaient fourni à l'analyse un cadre logique rigoureux, adapté au travail qu'il y avait à faire. »

« Une fois les dernière touches enfin apportées à ce cadre par Augustin Cauchy puis par Karl Weierstrass au XIXsiècle, les infinitésimaux disparurent au profit de la définition d'une limite.

« Cette définition très complexe nécessite énormément de réflexion et de pratique pour être assimilée. »

Cf. David Berlinski – Op. Cit. – Ibidem (2004)

Donc, nous avons un segment entre deux limites. Nous voyons que la géométrie analytique introduit un zéro entre les deux premiers nombres entiers sur un plan où les infinitésimaux n’atteignent jamais leur limite.

De fait, la dyade qui apparaît ici comme une limite autour du zéro ne se trouve dans les témoignages de la Gnose qu'aux extrémités d'un cône qui lui donne un sens sur la ligne du temps mais que l'analyse algébrique du plan inverse.

Sur son lieu d'origine, la monade inscrit la répartition des entiers au centre de leur symétrie là où elle n'apparaît comme telle qu'à partir du sens que lui donne sa dyade ; son inversion la faisant toujours fuir dans une fuite infinie vers l'avant.

Le monde des quantités défuntes est un univers sans fondement ni limite qui lui donne cet aspect spectral que le philosophe d'Oxford et l'ecclésiastique anglican pouvait pressentir dès la première moitié du XVIIIsiècle.

Nous voici à la fin de ce monde et au Commencement d'un autre là où les eaux d'en-bas et les nuées d'en-haut tendent à se confondre dans un chaos informe et vide. Et non plus seulement vers la fin des temps aux derniers décomptes des compte à rebours.

Rappelons qu'il faut distinguer ici les temps apocalyptiques qui ne concernent que leurs deux témoins – le Messie et le Sceau des prophètes – des temps qui s’enchaînent autour de la Rose+Croix et du Sacré-Cœur sur la même périodicité (360).

La mise en place au XVIIsiècle – entre 1604 et 1673 – de ces miroirs magiques qui captent les éons – les jours de l'année – fut concomitante avec celle du zéro sous les coordonnées de la géométrie analytique.

Ce dispositif – celui des miroirs magiques – fut l'objet d'interprétations beaucoup plus fantaisistes : du miroir noir aux crânes de cristal en passant par la boule qui pour le petit livre des tables de la Loi sont toujours au nombre de sept sous les étendards du Califat.

   

    

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