jeudi 14 avril 2022

Le signe du roi

Pour le douzième cycle du dixième mois de la décade
comprenant la nuit et le jour :

« Le mai 1868 est un grand jour. Le roi annonce son intention de reconstruire le vieux Burg en ruine près de Hohenschwangau, non loin de la gorge de la Pollat, un torrent qui bascule en une chute de quarante-cinq mètres.

« Pour traverser la gorge, un pont, le Marienbrücke, ou pont de Marie, construit sur ordre de la reine Marie, à été jeté en 1866. On y a une vue impressionnante.

« Adossé aux deux mille mètres du Saüling, une puissante montagne, on voit les reliefs boisés de Fussen, des lacs et jusqu'aux sommets du Tyrol. De l'aveu même du roi, « cet endroit inaccessible et sacré est un des plus beaux lieux du monde.

« Là, sur un éperon dressé à mille mètres, sera construit la Neue Burg Hohenschwangau, le nouveau château de Hohenschwangau, baptisé Neuschwanstein seulement en 1886. »

« Hohen [ – ] Schwan [ – ] Gau, le « Haut Pays du Cygne » et Neu [ – ] Schwan [ – ] Stein, la « Nouvelle Pierre du Cygne » : Lohengrin, toujours Lohengrin. Et Tannhaüser. Et Tristan. Et Parsifal... Tous les opéras de Wagner ou presque seront à l'honneur.

« Neuschwanstein s'élèvera comme un monument déguisé à la gloire wagnérienne. Wagner n'y vint jamais et Louis II y perdra sa liberté. » [ De fait, ce déguisement travestit la préséance des métamorphoses sur l’œuvre du dramaturge. ] [ ... ]

« Louis II se fixe sur le style roman et les châteaux forts du début [ du ] XIIIe siècle, le vrai Moyen Age, celui de Lancelot, de Parsifal, des chevaliers de la Table Ronde à la recherche du Saint-Graal. » [ ... ]

« Louis II est habillé [ du ] vaste manteau d'hermine de grand maître de l'Ordre de Saint-Hubert et de l'habit de velours noir qu'il avait fait modifier. Le long de sa main gauche, l'épée de l'Ordre. Sur sa poitrine, les jasmins de Sissi.* »

[ * L'impératrice Élisabeth d'Autriche, sa cousine. Le roi meurt en juin 1886. ]

Cf. Jean des Cars – Louis II de Bavière ou le roi foudroyé – L'Aigle et la Colombe (1975)

Hohenschwangau est le Haut pays des gaules et celui des Ardennes, de celles qu'on disait chevelues en les qualifiant par leurs voies fluviales sur les terres de l'âme et de la déesse Arduina qu'on identifiait à Diane ou à Anna – la mère de Marie et de Mara.

Dans les Métamorphoses d'Ovide le Cygne est celui des muses inconsolables qui pleurent des larmes d'ambre sur Phaéton abîmé dans l'Eider pour avoir voulu conduire le char du Soleil – Phébus – son père sous celui d'Artémis et d'Apollon.

Neuschwanstein apparaît à la fin du XIXe siècle comme la dernière balise dressée sur le vieux chemin qui ramenait l'âme des ancêtres de l'Oberland vers l'Atlantide immergée au large de l'embouchure d'un fleuve qui reliait la mer de Chronos à la Baltique.

« Je meurs de ma petite sœur, de mon enfant et de mon cygne » chante Léo Ferré en 1970 qui se les remémore comme un signe et Paul Verlaine dans son épitaphe au Roi-Lune – Seul Vrai Roi – « Martyr de la Raison selon la Foi ».

C'est Apollinaire qui aurait baptisé le roi selon son luminaire d'après Jean des Cars ; corps céleste dans l'hombre d'Apollon qu'éclaire la lumière d'Artémis.

On peut voir de même chez Louis Aragon de curieuses éloquences dans les hoquets d'un pianola comme autant de soleils révolus.

   

    

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