mardi 7 septembre 2021

Le goût des merveilles

Pour le premier cycle du huitième mois de la décade
comprenant la nuit et le jour :

« Dans le domaine des faits, de notre part aucune équivoque n'est possible : Il n'est personne de nous qui ne souhaite le passage du pouvoir des mains de la bourgeoisie à celles du prolétariat.

« En attendant, il n'en est pas moins nécessaire, selon nous, que les expériences de la vie intérieure se poursuivent et cela, bien entendu, sans contrôle extérieur, même marxiste.

« Le surréalisme ne tend-il pas, du reste, à donner à la limite ces deux états [ la vie intérieure et le contrôle extérieur ] pour un seul [ ce qui va au-delà du complémentarisme ethnopsychanalytique et psychosocial des sciences humaines [ ... ]

« [ ... ] en faisant justice de leur prétendue inconciliabilité [ sic ] pratique par tous les moyens, dont l'emploi trouverait mal à se légitimer s'il n'en était pas ainsi : je veux parler de l'appel au merveilleux [ ... ]

Cf. André Breton – Légitime défense (1926) cité par Henri Béhar et Michel Carassou

Malheureusement cette légitime défense sera un adieu aux armes avant la reprise des hostilités. Les quatre [ Aragon, Breton, Éluard et Péret ] adhère au parti communiste et l'annonce au grand jour en 1927.

Arthaud qui se fait exclure du mouvement avec Soupault qui refuse de s'engager sur le terrain de l'action politique à cette phrase assez juste qui ne l’empêchera pas de se perdre dans son exaltation de la liberté individuelle :

« Perpétuellement à la lisière des apparences, inapte à prendre pied dans la vie, le surréalisme en est encore à rechercher son issue, à piétiner sur ses propre traces. »

Vingt ans plus tard, Roger Vaillant décrit avec une certaine cruauté la tentation du communisme chez Breton qu'il voue au « Seigneur [ de ] l'ésotérisme » :

« 1925 : La révolution surréaliste.

« 1930 : Le surréalisme au service de la révolution [ communiste. ]

« 1947 : Le surréalisme contre la révolution [ communiste.]

Tandis que le Surréalisme révolutionnaire entend poursuivre « l'extermination [ radicale ] des résidus mythiques ». – Cf. La cause est entendue dès juillet 1947

« La poésie véritable [ est ] dans le goût du merveilleux. »

Paul Éluard – L'évidence poétique (1937)

« Si l'on voulait, il n'y aurait que des merveilles. »

Paul Éluard – Poésie involontaire (1942)

Le Merveilleux apparaît ici comme une catégorie dans l'harmonie des contraires entre l’intériorité et l'extériorité d'un individu qui vit en société ; mais il ne dit rien sur ce qui se passe à l'intérieur de cet individu du point de vue de sa spiritualité.

Le surréaliste est abandonné aux forces libidinales qui irriguent son âme et cet abandon le retranche de toute transcendance, de toute métaphysique dont il refuse le principe en-deçà de toute réalité surnaturelle.

Il eut été trop réactionnaire ou trop audacieux de s'en prévaloir comme tentera de le faire Pierre Reverdy en se retirant à Solesmes où il échouera dans son inclination pour la liturgie monastique non sans faire entendre une voix singulière.

Toutefois, il ne nous semble pas que la voix de Reverdy ait franchi le seuil du sanctuaire où l'au-delà de l'en-dedans ne cesse de descendre. Mais elle se tient sous son linteau là où le Christ frappe au tympan.

« Reverdy est surréaliste chez lui. »

André Breton
dans le Manifeste de 1924

   

    

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