mercredi 25 août 2021

Le bellator rex

Pour le vingt-troisième cycle du septième mois de la décade
comprenant la nuit et le jour :

« [ ... ] dès 1292, le poète – et alchimiste – Raymond Lulle, un Catalan, qui s'intéressait de longue date à la possibilité de convertir l'Islam à la foi chrétienne, s'est fait le propagateur d'un vaste plan de conquête et d'évangélisation des pays musulmans.

« Ce plan est le suivant : des missionnaires possédant une solide connaissance de la langue arabe – Lulle était lui-même arabisant – recevront l'appui d'une nouvelle armée de Croisés,

« [ ... ] armée dont le noyau sera formé par les deux Ordres de l'Hôpital et du Temple réunis en un seul, et dont le chef suprême prendra le titre de « Bellator Rex » et deviendra roi de Jérusalem.

« Dans un premier temps, Raymond Lulle espère convaincre le roi Jacques II d'Aragon [ le Juste ] d'entreprendre une croisade contre Grenade, toujours aux mains des Musulmans, mais c'est à Paris qu'il trouve des auditeurs attentifs, à la cour du roi de France. »

« Philippe le Bel comprend tout le parti qu'il peut tirer du rôle de « Bellator Rex » s'il a assez d'audace pour s'emparer du titre.

« Il sait la puissance que représentent les ordres militaires : les Hospitaliers règnent sur la Méditerranée, et les Templiers sont les maîtres du continent européen.

« Devenir le chef suprême à la fois des Hospitaliers et des Templiers, cela représenterait pour le roi de France un atout considérable, et il pourrait alors devenir un véritable souverain mondial en se parant d'un autre titre, celui de roi de Jérusalem. »

« Ceci n'est pas une hypothèse gratuite. Philippe le Bel a pensé réellement ce plan.

« Il l'a même écrit dans une sorte de programme en quatre-vingts points dont nous possédons un manuscrit, certes fragmentaire, mais suffisamment précis pour que nous puissions le restituer dans son ensemble. [ cf. un document aragonais de 1308 ]

« Ces documents montrent que Philippe le Bel songeait à abdiquer en faveur de son fils aîné pour devenir le grand-maître des Ordres réunis.

« Le nouvel Ordre devait prendre le nom de Chevaliers de Jérusalem, et son grand-maître porter le titre de roi de Jérusalem.

« Après la mort de Philippe le Bel, la charge de grand-maître devait revenir, de génération en génération, au fils aîné du roi de France.

« Tous les prélats, archevêques et évêques y compris, auraient dû leurs revenus au grand-maître, pour la conquête de la Terre Sainte, ne gardant pour eux qu'un salaire modeste.

« Il en aurait été de même pour les ordres monastiques non engagés dans la reconquête.

« De plus, le « Bellator Rex » devait jouir d'une sorte de droit de regard sur l'élection des papes.

« Ainsi Philippe le Bel serait-il devenu plus puissant que l'empereur, et cela pour la plus grande gloire du royaume de France : [ ... ]

« [ ... ] car le roi de France, sacré un jour ou l'autre roi de Jérusalem, régnerait comme un empereur romain sur une vaste fédération de nations et établirait ainsi la paix universelle. »

[ ... ] « Mais quand toutes les tentatives de fusion eurent échoué, par suite de l'intransigeance des Templiers trop confiants dans leur force, Philippe le Bel a compris que, ne pouvant devenir le maître du Temple, il devait l’abattre.

« Parce qu'il était très puissant, donc dangereux, et parce qu'il aurait pu servir un autre « Bellatores Rex » que lui-même. Cela, c'est une réalité historique.

« Le procès intenté aux Templiers, s'il appartient aussi à l'Histoire, résulte de la vengeance d'un homme qui a vu s'effondrer son vaste plan d'hégémonie mondiale, et qui n'a pas pardonné aux Templiers d'avoir refusé de coopérer avec lui. »

Cf. Jean Markale – Qui étaient les Templiers ? – L'évolution du Temple (1986)

« [ ... ] Philippe le Bel lui-même, en souhaitant porter le titre de « Bellator Rex », voulait devenir roi du [ Saint ] Graal, c'est-à-dire dépositaire de ce Sang Royal qu'il espérait bien transmettre à ses descendants.

« Le malheur, c'est que les Templiers n'ont pas voulu de lui. »

Cf. Jean Markale – L'énigme des TempliersLe Temple et le Graal (1986)

Markale reprend ici une étymologie du « Sangral » qui interprète le « San-Gréal » comme un « Sang-Réal ». Cette interprétation n'aurait probablement aucun fondement si ce n'était le goût noir des mûres...

« Il aurait fait bon s'y endormir un soir de printemps,
quand les lilas sont en fleurs,
pour ne se réveiller qu'à la fin des temps,
lorsque les pommiers de l'île d'Avalon produiront des fruits mûrs toute l'année. »

Markale (1948)
au temps où il remontait la vallée de l'Epte

et l'acharnement

   

    

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