vendredi 4 novembre 2022

La poitrine du Seigneur

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Dans l'annexe qu'il consacre à Jean l'évangéliste, Jean-Christian Petitfils rappelle que Papias au début du deuxième siècle parle encore de deux Jean :

- celui qu'il cite parmi les apôtres avec André, Pierre, Philippe, Thomas, Jacques et Matthieu entre ces deux derniers et que Petitfils identifie à l'un des deux fils de Zébédée ou à l'un des Douze

- et le Presbytre qu'il cite avec Ariston comme un témoin vivant que Petitfils identifie à l'Évangéliste avec Polycrate que l'évêque d’Éphèse signale au pape Victor à la fin du siècle comme celui « qui a reposé sur la poitrine du Seigneur »

Il est néanmoins probant que Celui qui repose sur la poitrine du Seigneur ne peut être que l'apôtre Jean que Petitfils imagine mort dès le début des années 40 pour s'autoriser à l'identifier au Presbytre tout en l'identifiant aussi à l’Évangéliste.

Le Presbytre ne peut être ni l'un ni l'autre si l'on accepte de les dissocier mais l'Ancien qui signe les deux dernières épîtres du corpus johannique et que Petitfils identifie à « l'un des membres de la première génération apostolique » qui ne fait pas partie des Douze.

Petitfils n'identifie pas ce membre au Presbytre de Papias ni à l'auteur du deuxième évangile qui appartiendrait pourtant d'après lui à « une génération légèrement postérieure » quand il nous rappelle que Marc lui aussi s'appelle Jean.

Si Petitfils ne voit pas les liens qui s'imposent entre le Presbytre, l'Ancien et Marc, il voit bien le style qui relie indubitablement la première épître du corpus johannique au prologue du quatrième évangile chez celui que la tradition asiatique qualifie de Théologien.

Mais ce dernier est-il pour autant le disciple que Jésus aimait ou Celui qui repose sur la poitrine du Seigneur et ceux-ci sont-ils seulement les mêmes tels qu'Irénée de Lyon ou Clément d'Alexandrie semble les confondre dès la fin du deuxième siècle ?

Si l'Apôtre qui repose sur la poitrine du Seigneur n'était pas l'auteur de l'Apocalypse qui sort ici du cadre que Petitfils donne à son annexe sur l’Évangéliste, il serait totalement absent du corpus johannique mais néanmoins présent dans la tradition éphésienne.

Où l'Apôtre et l’Évangéliste ne se confondent guère pour l'Apocalypse dans la stylistique de son évangile et de son épître qui ne serait être à la fois celle d'un Théologien et celle d'un disciple bien-aimé qui s'y superposent dans leur amplification théologique.

Donc, il nous en faut quatre : l'Apôtre, l'Ancien, le Théologien et le disciple que Jésus aimait qui ne saurait être Celui qui repose sur la poitrine du Seigneur dès lors qu'on identifie ce dernier au premier d'entre-eux – cf. Jean XIII 25 et XXIV 20.

Mais nous devons reconnaître que l'évangile du Théologien tend à les confondre et les confond – cf. Jean XIII 23 et 25 – sans nous expliquer pour quelle raison obscure ils ne sont jamais nommés comme tel dans son récit.

   

    

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