lundi 13 février 2023

Le mécontentement

...

« M. Chodkiewicz qui cite [ le ] passage des Haltes [ où l’Émir déclare qu'ibn 'Arabî est le trésor dans lequel il puise ce qu'il écrit en le tirant « soit de sa forme spirituelle [ ... ] soit de ce qu'il a lui-même écrit dans ses ouvrages » ] souligne par ailleurs que ...

« ... la relation privilégiée d'abd al-Qadîr avec ibn 'Arabî qu'établit rituellement et symbolise l'investiture de la « khirqa akbariyya » dès [ sa ] jeunesse [ ... ] est confirmée par de fréquentes visions rapportées dans les « Mawâqif ».

« Dans l'une d'elles, ibn 'Arabî lui apparaît d'abord sous les traits d'un Lion [ qui rappellent ceux d'Abû Madyan ] et lui ordonne de mettre sa main dans sa gueule ; lorsqu'ayant vaincu sa terreur il accomplit ce geste, ibn 'Arabî reprend figure humaine.

« Dans une autre, le Sheykh al-Akbar manifeste sa satisfaction de la réponse faite par abd al-Qadîr à certaines critiques visant l'auteur des « Futûât ».

« Dans une autre encore, ibn 'Arabî exprime son mécontentement de voir abd al-Qadîr s'adresser à des chrétiens en employant la formule rituelle « as-Salâm 'alaykum » alors que l'émir avait trouvé une justification légale à cette pratique normalement interdite.

« Ailleurs, ibn 'Arabî lui explique certains passages de ses œuvres ou les étudie avec lui, ou l'informe qu'aucun des commentateurs des « Fusûs al-Hikam » n'en a perçu le sens véritable,

« ... lui remet un de ses ouvrages [ et ] lui communique un écrit scellé où – après avoir brisé le sceau – il découvre sa propre image. »

Cf. Introduction de Michel Chodkiewicz aux « Écrits spirituels » citée dans celle d'abdu'Llâh Penot aux « Livre des haltes » de l’Émir abd al-Qâdir (1982 et 2008)

« Si le nom du « Kitâb al-Mawâqif » comporte [ bien évidemment ] une allusion à l'enseignement d'ibn 'Arabî, ...

[ Il y a entre tout « maqâm » ou tout « manzil » et la « station » ou la « demeure » suivante, un « mawqif » où le noble voyageur fait « halte » sur un point médian pour s'y instruire des convenances requises – « adâb » – pour la suite de son voyage. ]

« ... c'est de manière tout à fait explicite que le contenu de l'ouvrage se place sous l'autorité du Sheykh al-Akbar [ telle que déjà citée à propos du trésor où il puise ce qu'il écrit ... ]

« ... le tirant soit de sa forme spirituelle – « min ruâniyyatihî » – soit de ce qu'il a lui-même écrit dans ses ouvrages. »

« En de nombreux passages, il exprime sa certitude qu'ibn 'Arabî est bien le « Sceau de la sainteté muammadienne » – fonction qu'il définit avec précision dans le chapitre 353 des « Mawâqif » – ...

« ... et sa conviction que l'auteur des « Fuus » est à ce titre – après les prophètes – celui dont les conseils sont les plus profitables aux hommes. »

Cf. Op. Cit. Ibidem pour le premier d'entre eux où hélas ni l'un ni l'autre n'ont cru devoir traduire le trois cents cinquante troisième « mawqif » parmi ceux (40 + 50) qu'ils nous donnent à lire.

Quant au mécontentement du Sheykh al-Akbar, il éclaire d'une lueur incertaine l'imbroglio dans lequel elle éclaire cette opposition à une justification légale pour le moins étrange :

Il va de soit que la spécificité du Sceau muammadien ne serait être étrangère à la généralité d'un Sceau qui entretient dans le même domaine un rapport privilégié avec Celui dont la sainteté est la plus absolue.

Il est dès lors tout à fait compréhensible que ce mécontentement s'exprime précisément à l'encontre d'une salutation réservée aux seuls musulmans que l’Émir adresse d'une façon indue aux disciples de Celui qui la représente.

Mais comment le reprocher à ce militant qui dès 1838 s'adressait déjà au Sultan afin d'être relevé de sa charge pour se consacrer à un autre royaume qui lui paraissait encore plus grand que le sultanat d'Occident.

Il existe ici aussi un royaume dont on ne sait rien
entre le Mont Bayard et le Biez de Morsaint
vers le quai Saint-Michel en remontant le Train
et si Dieu vous garde jusqu'au bout du chemin
dans l'éclat de sa cataracte au beau milieu du jardin
aussi aveugle que Lutgarde quand le Cœur du Christ lui vint.

   

    

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