Les études bouddhiques

Pour le vingt-et-unième cycle du troisième mois de la décade
comprenant la nuit et le jour :

« À la fin du XVIIe siècle, à l'occasion des ambassades de Louis XIV auprès du roi de Siam, on commence à prendre conscience en France, et de là en Europe, de l'existence du Bouddhisme.

« Somonacodom » (c'est à dire en pâli le Samaṇa Gotama) attire l'attention des auteurs qui se préoccupent des diverses religions du monde. »

« Mais ce n'est qu'au milieu du XVIIIe siècle que sont entreprises des recherches scientifiques sur le Bouddhisme.

« Elles le sont par Joseph Deguignes, professeur au Collège royal à Paris, qui, connaissant l'arabe et le persan, a été en outre un des premiers pionniers européens des études chinoises, [ ... ]

« [ ... ] bénéficiant de celles qu'avaient entreprises en Chine même les missionnaires jésuites.

« Deguignes s'interessait à l'histoire de toute l'Asie et s'attachait particulièrement à celle des Huns qu'il publia en cinq volumes à partir de 1756.

« La religion de « Fo », nom chinois du Buddha [ sic ] ne lui avait pas échappé et il rechercha sur elle, sur son origine indienne et ses développements en Extrême-Orient, des données dans les Annales chinoises.

« Son travail, dont les résultats ont été exposés dans son grand livre sur l'histoire des Huns et l'avaient été déjà auparavant dans un mémoire intitulé Recherches sur les philosophes appelés Samanéens (1753), [ ... ]

« [ ... ] à été repris dans ses Recherches historiques sur la religion indienne et sur les livres fondamentaux qui ont été traduits en chinois (1776).

« Il correspond à la première étape de la science vers la connaissance du Bouddhisme : celle de la collecte des sources indirectes et des témoignages extérieurs. »

Cf. Jean Filliozat – Les étapes des études bouddhiques (1987)

La première étape des études bouddhiques coïncide avec la fin de la dernière période du Bouddhisme – celle de la Loi finale que Nichiren qualifie de Mahâyâna définitif et qui devait s'étendre pendant cinq cents ans à partir de 1280.

720	2000	1280	500	1780
▲		▲		▲
Nirvana du bouddha Sâkyamuni	►	Mahâyâna définitif du Daishonin	►	fin du Dharma oriental

« Dans cette voie on continué, mais seulement à partir du début du XIXe siècle, plusieurs savants : [ ... ]

« [ ... ] l'Allemand Klaproth, les français Abel-Rémusat et Landresse, et surtout Stanislas Julien qui ont traduit les relations sur l'Inde des principaux pèlerins bouddhiques chinois du IVe au VIIe siècle. »

« En même temps naissait la connaissance par documentation sur place, aux sources mêmes dans les pays bouddhiques, [ ... ]

« [ ... ] surtout grâce à l'initiative de chercheur hongrois comme Csoma de Körös au Tibet, ou anglais comme Hodgson au Népal, et comme Turnour, puis Spence Hardy et Childers, et plus tard Rhys Davids à Ceylan.

« Dans la collecte immense de documents qu'on faite ces chercheurs et leurs émules, ils ont été aidés par les informateurs du pays, lamas tibétains ou religieux de Ceylan.

« Ce fut là la deuxième étape des études bouddhiques. »

Cf. Jean Filliozat – Les étapes des études bouddhiques (1987)

Cette prise de contact qui correspond à la deuxième étapes des études bouddhiques coïncide avec la perte de substance du sujet observé au-delà de la dernière période qui lui est attribué par sa doctrine – celle du « Paścimadharma ».

« [ ... ] déjà à l'époque où se faisaient jour des tendances partiales en faveur du « Bouddhisme du Sud » ou – plus rarement – en faveur de celui « du Nord » [ l'école de langue palie et les autres ], [ ... ]

« [ ... ] le maître des études bouddhiques au XIXe siècle, Eugène Burnouf, avait nettement ouvert la voie vers une étape supérieure de ces études : celle de l'investigation objective générale et de la confrontation critique. » [ ... ]

« Il appliquait à la philologie indienne la méthode qui donnait déjà à la physique et aux sciences naturelles un essor qu'en une longue suite de siècles la science ancienne n'avait jamais connu, [ ... ]

« [ ... ] la méthode qui vise la connaissance intégrale et ne se contente point de juger sur les premiers faits apparents sans rechercher les autres. »

Cf. Jean Filliozat – Les étapes des études bouddhiques (1987)

L'étape supérieure de Burnouf ne cherche pas à rencontrer une tradition vivante mais à saisir l'objet de son étude qu'elle réifie au fur et à mesure qu'elle le saisit. Et cette réification ne serra pas sans récurrence.

« Ses œuvres majeures ont été l'Introduction à l'histoire du Bouddhisme indien (1844) et la traduction du texte sanskrit du Lotus de la Bonne Loi (1852) [ ... ]

« [ ... ] accompagnée de vingt et un mémoires sur des points particuliers, où il mettait en œuvre toute la documentation accessible et particulièrement celle des texte du canon pali dont il publiait des morceaux étendus. »

« L'orientation donnée par Burnouf aux études bouddhiques était définitive. Il n'y a pas de connaissance scientifique du Bouddhisme sans l'emploi de cette méthode.

« L'étape critique se prolonge et se prolongera indéfiniment, car la matière à connaître est inépuisable et sa prospection, qui procède elle-même par étape, ne s'achèvera pas. » [ ... ]

« Renan avait senti, auprès de Burnouf, l'importance du Bouddhisme et cherché à prendre modèle, pour l'étude des faits chrétiens, sur l'attitude objective adoptée à l'égard du Bouddhisme par Burnouf.

« Il s'y intéressait particulièrement, y voyant un athéisme devenu une religion éminemment morale et bienfaisante, un Catholicisme sans dieu. [ ... ].

« Les études bouddhiques servaient donc pour lui de type idéal aux études d'histoire des religions. » [ ... ]

« Mais à l'époque de Renan, on n'en était encore qu'à la collecte et au classement de la documentation générale des études bouddhiques, [ ... ]

« [ ... ] ainsi qu'aux premières interprétations des idées et au repérage dans l'histoire des phases successives de l'évolution des doctrines et des pratiques.

« La dernière étape des études bouddhiques, celle où l'on recherche leurs raisons d'être, est en cours depuis lors. » [ depuis Le Bouddha et sa religion de Barthélemy Saint-Hillaire qui date de 1860 ]

Cf. Jean Filliozat – Les étapes des études bouddhiques (1987)