vendredi 19 mai 2023

Le sage de Bandiagara

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« Le 10 mars 1861, El Hadj Omar [ Tall ] entrait à Ségou, capitale du royaume bambara. »

« Lorsqu'en 1862 apparut El Hadj Omar, Grand Maître de l'Ordre Tidjanî et qu'il conquit l'Empire [ peul ] du Macina, cet empire [ fondé en 1818 ] avait déjà commencer à se désagréger spirituellement ... »

« La Tidjaniya, confrérie religieuse des Toucouleurs simposa sur la rive droite du Niger tandis que la confrérie kounti gardait son influence sur tout le Macina. »

« En 1885, Amadou Chékou [ l'un des fils d'El Hadj Omar ] se rendit [ de Ségou ] à Nioro pour barrer la route aux armées d'occupation françaises, alors commandées par le colonel Archinard. »

« Au début de 1890, alors que Ségou était à la veille de tomber entre les mains des Français, Tierno Bokar [ Salif Tall ] alors âgé de quinze ans [ avait reçu de son grand-père maternel – El Hadj Saydou Hann – une influence religieuse. ]

El Hadj Saydou Hann qui mourru en mars 1890 était un « grand mystique soufi formé à l'école de la Qadiriya avant d'être entré dans l'Ordre Tidjani » sous l'influence d'El Hadj Omar.

Après avoir rendu Ségou aux Diarra – « représentants de la vieille famille royale Bambara » – Archinard fit rétablir les droits des Toucouleurs à Bandiagara en y faisant monter Aguibou Tall sur le trône d'un royaume fondé par son cousin Tidjani dès 1864.

C'est ainsi que Bandiagara devint le fief de Tierno Bokar où il avait trouvé refuge après la mort de son grand-père et qu'Hampâté Bâ en fit un Sage avec la complaisance de son éditeur français – Marcel Cardaire – soucieux d'en rétablir l'honneur.

Officier français aux Affaires musulmanes, Marcel Cardaire est présenté par Hampâté Bâ comme « l'élève du grand ethnologue Marcel Griaule » qui publiait un livres assez remarquable sur la mythologie dogon en 1948 – « Dieu d'eau ».

C'est aussi le cosignataire en 1957 du livre qu'Hampâté Bâ réécrira plus tard, sans doute pour le dégager des « intérêts » et du « prestige » colonial « de son pays » mais sans se départir de l'académisme anthropologique qui le caractérise.

Tailleur-brodeur de condition plus que modeste, Tierno Bokar se détourna sur le conseil de sa mère de la carrière des armes que sa parenté avec Aguibou Tall lui rendait pourtant accessible :

« Plutôt que d'ôter la vie aux hommes [ lui dit-elle ] apprends à couvrir leur nudité corporelle avant d'être appelé à l'honneur de pouvoir couvrir leur nudité morale ou spirituelle en leur prêchant l'Amour. »

Honneur qui lui vint au décès de son maître après huit années d'étude à Bandiagara sous la direction d'Amadou Tafsirou Bâ – « grand mystique de l'Ordre Tidjani » – et le temps qu'il passa dans la province de Louta auprès de sa belle-famille après son mariage.

Cf. Amadou Hampâté Bâ – Vie et enseignement de Tierno Bokar. Le Sage de Bandiagara – La vie – Racines (1980)

« Trois jours par semaine, les élèves de l'écoles coranique avaient congé. Pendant ces trois jours, Tierno tenait chez lui des réunions ouvertes à tous, cosacrées aux enseignements de la Tidjaniya. Tous les marabouts de la ville venaient l'écouter.

« Le vieux Alpha Ali – à l'époque le plus grand maître d'école coranique de Bandiagara – lisait des passages de [ la ] « Diawharatul-maani » – la Perle des significations – le livre majeur de Cheikh Aḥmad Tidjani.

« Tierno Bokar qui était Cheikh de la confrérie, commentait et interprétait ces passages, d'abord selon les enseignements de Cheikh Aḥmad Tidjani lui-même, ensuite selon le livre d'El Hadj Omar « ar-Rimma'a » – les Lances – ...

« ... enfin selon le fruit de ses propres méditations – de son « ijtihad ». C'est à la qualité de son « ijtihad » qu'il devait sa réputation de maître enseignant. »

« Quant aux aspects plus spécifiquement ésotériques de l'enseignement de la Tidjaniya – science des nombres, des lettres et des formes géométriques – il les dispensait individuellement selon les aptitudes de chacun.

« De même, c'est individuellement qu'il nous guidait sur le chemin du perfectionnement intérieur [ et utilisait ] « une méthode mnémotechnique » [ en traçant ] « sur le sable avec son index ...

« ... une série de points qui peu à peu s'ordonnaient en un schéma simple qui frappait l'attention et se gravait aisément dans la mémoire. »

Plusieurs schémas illustrent les vingt-deux points du « Pacte primordial » [ S 7 V 171 ], ceux de la religion et ceux de la « Sharia bathénienne » – la Loi intérieure – pour la Synthèse de l'enseignement ésotérique : le soufisme et la Voie tidjane.

Cf. Amadou Hampâté Bâ – Vie et enseignement de Tierno Bokar. Le Sage de Bandiagara – L'enseignement (1980)

- dix-neuvième point du « Pacte primordial » : « Acquiers le premier soixantième [ du Noble Coran ] ou à défaut la connaissance des onze sourates suivantes » [ qui suffisent largement ] : « 1 » + « 10 » de « 105 à 114 » qui font cinquante-cinq versets.

Le Sage joue ici avec le nombre « dix-neuf » qui correspond à celui des lettres de la « basmala » et avec le nombre « onze » qui correspond à celui du « dhikr » de la « djawharatu'l-kamal » pour la « wazifa » du « wird » des « hamallistes ».

Or, nous n'avons trouvez qu'une unité de quarante versets comprenant la « Fâtiḥa » (1) et les « Mu'awidhatan » (113 et 114) à l'intérieur du « Kawthar » (108) construit sur un septénaire – de 108 à 114 – semblable à celui des sept versets de la Première.

Le verset ineffable est celui de la « basmala » qui apparaît comme entête sur chacune de ces sourates sans être compté au nombre de leurs versets ; sauf pour la première d'entre elles et conformément à la suite du quaternaire :

« (1) + (2 x 2) + (3 x 3) + (4 x 4) + (2 x 5) »

« (1) + 4 + 9 + 16 + 10 »

« 40 »

Mais le nombre des cinquante-cinq versets de ces onze sourates donne une image assez similaire de la quintessence qui se dissimule dans la paire de cinq de la décade qui caractérise la figure du pique pour la suite du quaternaire.

Ce qui montre une méditation plutôt convergente vers la réalité efficiente de ces nombres là où ils apparaissent.

Les « dhikr » de la « tariqa » tidjane et les trois piliers du « wird » :

1. « Lazim » [ les trois cents deux fois par jour (600) ] :

- cent fois « Astaghfiru'Llâh » : Demande de pardon à Dieu – « Tawba »

- cent fois « Salatu'l-Fatihi » : Prière de l'Ouverture sur le Sceau des prophètes – « Taṣliya »

- cent fois « Lâ ilâha illa Llâh » : Attestation de l'Unicité divine – « Tawḥid »

2. « Wazifa » [ une ou deux fois par jour (360) + (22) ] :

- trente fois « Astaghfiru'Llâh al-'Adhîm iladhî lâ ilâha illa Huwa al-Ḥayy al-Qayyûm »

- cinquante fois « Salatu'l-Fâtiḥî » : Prière de l'Ouverture sur le Sceau – « Taṣliya »

- cent fois « Lâ ilâha illa Llâh » : Attestation de l'Unicité divine – « Tawḥid »

+ onze ou douze fois * « Djawharatu'l-kamal » : Perle de la Perfection – « Ḥaqîqa »

3. « Tahlil » [ le jour de la « Jumu'a » (1.000) + (600) ] :

- mille fois « Lâ ilâha illa Llâh » : Attestation de l'Unicité divine – « Tawḥid »

+ six cents fois « Allâh » : Le Nom de Majesté – « Jalâl »

* Onze ou douze selon les obédiences, Tierno Bokar étant passé de douze à onze.

Salutation et Paix sur le Noble Prophète
l'Ouverture et le Sceau
Témoin de la Vérité par la Vérité
et Guide sur la Voie
de ceux qui le suivent

A M Y N
   

    

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